Saint Sever d’Agde

 

La Vie de  Saint Sever, originaire de Syrie, fut probablement écrite vers la fin du VIe siècle par un moine qui, de la fenêtre de sa cellule, voyait encore l'épave du bateau qui l'avait amené sur nos rives, vers 456. Sever, accompagné de quelques uns de ses serviteurs, dans sa mission d’évangélisateur, avait quitté son pays sur une barque avec son or et ses richesses et confié sa destinée à la Providence.  

 

Les vents le firent aborder à l'embouchure de l'Hérault,  à l'emplacement de l'actuel sanctuaire de ND de la Genouillade.

 

Trouvant la ville d’Agde ravagée après trois invasions successives des barbares, il donna toutes ses richesses aux Agathois et à l'évêque Béticus, pour subvenir aux besoins des pauvres et de la ville en ruines.

 

Il fonda, à l’endroit où il avait débarqué, un ermitage dédié à la Vierge Marie et édifia, dans la cité d’Agde, un couvent bâti sur l’emplacement de l’actuelle église Saint André dont il devint l’abbé et qui compta, dit la chronique, plus de 350 moines.  Il laissa alors l'ermitage aux mains de ses compagnons, ermitage qui deviendra le sanctuaire Notre Dame de la Genouillade rendu célèbre à la suite de l’apparition mariale lors d’une grave et mémorable inondation.

 

Sever mourut probablement en l’an 513  et sa dépouille fut accueillie dans un édifice religieux, bâti à l’emplacement de l’actuelle église Saint Sever et connu alors sous le vocable de Saint Martin.

 

Quelques années plus tard, le lieu d’ensevelissement s’étant révélé trop pauvre et trop exigu, au milieu du VIème siècle, une nouvelle église de pèlerinage fut bâtie autour de la tombe de Saint Sever et la vénération et les prières faites dans cette église, trois fois rebâtie, n’ont pas cessé depuis 15 siècles.

 

La première construction paléochrétienne (V – VIème siècle)

 

Les sondages effectués ont mis à jour des tronçons de murs qui permettent de restituer :

- une nef unique de 7,50 m de large pour une longueur atteignant au moins 22,50 m.

- un chœur, en léger décrochement, de 6,60 m de large et 7,20 m de long.

 

                 (Eglise paléochrétienne dans le tracé de l’église du XVème siècle)

 

L’hypothèse la plus probable sur cette construction est qu’une chapelle de petite taille, connue sous le vocable de Saint Martin, existait déjà à la mort Sever, bienfaiteur de la ville d’Agde. Cette chapelle aurait alors accueilli la première sépulture du saint. L’on peut supposer que ce lieu d’ensevelissement s’étant révélé trop exigu, on ait érigé, dès le début du VIème siècle, une église de pèlerinage où les fidèles pouvaient vénérer et prier autour de la « memoria » du saint.

 

La deuxième église romane (XI – XIIème siècle)

 

Cette église est identifiée par des vestiges architecturaux significatifs :

 

- une absidiole encore bien visible qui s’agrégeait à un chœur roman.

 

- six colonnes adossées, le long des gouttereaux, réutilisées dans la construction de 1499.

 

- la porte nord, accès à la première travée à partir de la rue Saint-Sever.

 

 

Cette église semble n’avoir eu qu’une durée de vie fort réduite car Agde subit les conséquences de la guerre désastreuse entre la France et l’Aragon : en 1286, Roger de Loria, au service de Pierre III d’Aragon, pille la ville, incendie les principaux bâtiments et tue les hommes adultes. Entre 1348 et 1372, Agde connaît la Peste, les conséquences de la guerre de Cent Ans et les pillages des Routiers.

 

Il y a aussi, un épisode moins connu, la guerre juridico-économique avec Aigues-Mortes. Les deux ports se disputent le commerce du Languedoc. Louis IX (plus connu sous le nom de Saint-Louis) a accordé à la fin du siècle précédent des privilèges à Aigues-Mortes, qui ont permis à ce port de supplanter les autres. En 1423, Charles VII prend un arrêt en faveur d’Agde et de la liberté du commerce. Il faut dire que le trafic d’Aigues-Mortes décline de plus en plus : le chenal reliant le port à la mer est ensablé par les alluvions du Rhône. Recommence alors pour la ville d’Agde une période de prospérité et de reconstruction.

  

3 - L’église gothique méridional (XVème siècle)

 

En ce milieu du XVème siècle, le culte des reliques était alors à son apogée. La foule de croyants, désireux de recevoir des grâces particulières ou de guérir de certaines maladies, aimait à approcher des reliques, à les vénérer, à les toucher, à s'imprégner du fluide bienfaisant qui émanait d'elles.

 

Posséder de prestigieuses reliques comme celles de Saint Sever était donc une source inégalée de prestige pour l'église qui les détenait et un judicieux placement pour l'économie locale en même temps.

 

Les prélats italiens en charge de l’évêché agathois prirent la décision de faire rebâtir l’église dans le style gothique méridional en ce début de la « Renaissance ». Elle fut consacrée en 1499 par le chanoine Pastorelli.

 

 

 

Cette église à trois nefs, va être ancrée sur ce qui apparaît comme sûr et stable, les arases des murs du VI /VIIe siècle. Cette réutilisation, mise en évidence par les recherches de

 

R. Aris, n’est peut-être pas la seule et il est possible que le tracé général de cet édifice suive, d’assez près, celui de l’église romane disparue : murs périphériques, porte nord, transept et tracé du déambulatoire adopté par le nouveau chœur.

 

Six chapiteaux, de grandes dimensions, sommant les colonnes de la nef, ont été retrouvés et sont, pour quatre d’entre eux, réemployés dans l’église actuelle.

  

L’église actuelle (XIX – XXème siècles)

 

Malgré les vicissitudes de l’Histoire, si elle n’avait pas connu le désastre de 1922, l’église gothique serait arrivée jusqu’au XXe siècle sans grands changements, le rajout de chapelles latérales, un grand classique, n’ayant pas modifié en profondeur son aspect général.

 

Le désastre de 1922, voit disparaître la couverture du bâtiment, aussi bien celle de la nef centrale que celles des nefs latérales.

 

La solution apportée va, profondément, altérer l’équilibre visuel des éléments de la nef puisque, à la place de trois nefs et de trois couvrements différenciés, une seule voûte est jetée sur le vaste volume qu’elle représente avec ses collatéraux. Cet exploit qui ne pouvait s’envisager pour le Moyen Âge a été réalisé par le XXe siècle, en 1952-1953 à l’aide, il est vrai, d’un matériau « moderne », la brique creuse.

 

Des six chapiteaux, de grandes dimensions, sommant les colonnes de la nef :

 

- deux furent maintenus sur les colonnes portant l’arc triomphal, à l’entrée du transept,

 

- deux remployées comme éléments de décor supportent deux pseudos ambons, de part et d’autre de l’arc triomphal,

 

- deux ont été retrouvés, décorant les angles de la terrasse précédant la chapelle Notre-Dame de Centeilles sur la commune de Siran en Minervois.

 

C’est en cette église de Saint Sever que trône le crucifix du Saint-Christ d’Agde œuvre magistrale datant de la fin XVème – début XVIème siècle.

 

C’est en cette église de Saint Sever que trône le crucifix du Saint-Christ d’Agde œuvre magistrale datant de la fin XVème – début XVIème siècle.